Catherine CHALUMEAU
Adjointe DRH
Elivia
Bertrand DRUON
Directeur Général Adjoint
Elivia
Yalcin AVCIOGLU
Directeur des Ressources Humaines
Caisse d’Épargne Hauts de France
Atelier animé par
Céline RAFFARD
Quaternaire
Face à la pénurie de ressources et aux difficultés de recrutement, comment s’organiser pour faire monter rapidement en compétences celles et ceux qui arrivent sans les qualifications adaptées ? Les leviers sont nombreux, notamment pour accélérer la montée en compétence managériale. Retours d’expérience de Catherine Chalumeau et Bertrand Druon, d’Elivia, et Yalcin Avcioglu de la Caisse d’Epargne Hauts-de-France.
D’abord, de quelles compétences parle-t-on et comment les repérer ? « Si les hardskills – compétences techniques – de nos conseillers de vente intéressent bien sûr les clients, les softskills – compétences relationnelles, souvent négligées – sont devenues prioritaires à leurs yeux, explique Yalcin Avcioglu, le Directeur des Ressources Humaines de la Caisse d’Epargne Hauts-de-France (3 000 collaborateurs, 300 agences). Nous cherchons d’abord des personnes qui ont ces compétences : écoute, bienveillance, empathie. Le métier de banquier s’apprendra ensuite. » Avec le développement des technologies et le changement permanent dans lequel évoluent nos entreprises, les compétences techniques et règlementaires deviennent vite obsolètes. Il faut donc apprendre à apprendre, à réfléchir, à interagir avec notre écosystème.
Pour Bertrand Druon, Directeur Général Adjoint d’Elivia, n°2 français de la viande (2 700 salariés et intérimaires, 13 sites de production), les compétences sont tellement multiples qu’il faut simplifier pour se focaliser sur les besoins prioritaires. « Pour cela, nous nous sommes concentrés sur le repérage des potentiels – des collaborateurs présentant des dispositions que nous allons ensuite former – et sur le recours à des managers leaders, capables d’embarquer, d’animer, à qui nous demandons de détecter les potentiels. En parallèle, nous avons facilité l’accès à certains postes. »
Comment développer les compétences ?
Si la formation est l’outil le plus utilisé, elle doit être individualisée et articulée avec d’autres dispositifs. En 2020, Elivia lance « Management by Elivia », un vaste programme de formation managériale pour 310 collaborateurs, couplé à un accompagnement opérationnel individuel. « C’est la force de ce projet de transformation. Ces accompagnements ont permis de répondre aux attentes de la Direction souhaitant voir ancrer des « figures imposées » à tous les managers (mieux communiquer avec du management visuel, doper la capacité à présenter et piloter des projets, etc.). Ils ont également permis de faire monter en compétences sur des « figures libres » répondant à des besoins spécifiques (savoir gérer un conflit par exemple) » explique Catherine Chalumeau, adjointe DRH. Un investissement dans la montée en compétences des talents existants, certes, mais hautement efficace puisque conforme aux principes d’apprentissage en quatre étapes que nous enseignent les neurosciences :
- Le focus,
- Le feedback immédiat pour valider l’acquis,
- La pratique,
- La répétition pour fixer la notion.
Autre levier : le gaming. « 50% de nos formations sont réglementaires, donc peu attrayantes, sourit Yalcin Avcioglu. C’est pourquoi nous avons mis en place des modules ludiques pour le collaborateur au moment de son arrivée en poste, sur le réglementaire, l’organisation, les valeurs, le modèle. » Pour compléter la démarche, le DRH s’appuie sur la plateforme interne Self Care. « On ne veut plus adresser le même catalogue de formations aux collaborateurs. Nos conseillers ont des micro-besoins pour répondre aux besoins clients (l’un va devoir développer ses compétences en fiscalité, l’autre en crédit par exemple). Cette plateforme nous permet de faire de l »adaptive learning » et de développer la compétence au bon moment. Nous avons recouru aux méthodes marketing – notifications, e-mailings, SMS, etc. – pour l’aborder sur le mode « cette compétence doit être développée, comment peux-tu la placer dans ton agenda ? » »
Quels moyens mettre en œuvre ?
Les talents qu’abrite votre entreprise ne vont pas se développer seuls. « Pour accompagner notre nouvelle orientation vers des profils atypiques, nous avons créé un incubateur de talents, avec parcours de formation hyper-personnalisé », précise Yalcin Avcioglu qui complète avec d’autres outils, toujours en interne : tests de personnalité sur les softskills et madskills (créativité), système de cooptation en interne, mécénat de compétences, et open data pour repérer les collaborateurs aux compétences atypiques et pour bien faire passer le message : les pas de côté sont possibles ! « La communication terrain est primordiale, ajoute Bertrand Druon : des messages simples sur les compétences et l’implication de la direction qui doit servir de modèle aux managers. » L’entreprise envisage également de créer une école orientée métiers et management, qui sera 100 % opérationnelle en 2026.
Les idées clés
- Apprendre à apprendre : avec le développement des technologies et de l’IA, les compétences cognitives deviennent majeures
- Créer le focus : il est urgent de se concentrer sur les enjeux et risques clés pour simplifier le quotidien du terrain, ce sur quoi on l’attend, ce sur quoi le former
- Mixer collectif et personnalisation : personnaliser pour répondre aux besoins individuels, sans laisser l’entreprise évoluer moins vite que l’individu
- Apprendre par tous les moyens : la formation collective pourvu qu’on sache créer l’inattendu et la compléter d’autres dispositifs d’accompagnement opérationnel individuel, de lectures, de conférences, …
- Rendre possibles et visibles les pas de côté : faire prendre conscience aux collaborateurs de « leur possible », communiquer sur les mouvements dans l’entreprise, leur proposer d’évoluer avant qu’ils ne soient au sommet de leur apprentissage